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Le cynorhodon
8 mars 2015

L'avion qui sent le sapin

Y'a des semaines comme ça qui vous marquent.

Après deux jours levé à 5h00 et deux jours de réunion avec mes "collègues" italiens, je me retrouve donc à l'aéroport de Florence à 6h00 du mat'. Les frissons allaient venir. La nuit avait été mouvementée: une tempête de vent avait balayé la cuvette florentine à partir de minuit et j'avais peu et mal dormi sous les coups de boutoirs de je-ne-sais-quel battant mal fermé. Après avoir galéré pour enregistrer, nous avons appris que la majeure partie des avions était clouée au sol à cause du vent. En effet l'aéroport de Florence est un ancien aéroport militaire, construit sous la seconde guerre mondiale: la piste courte entourée de montagne fait qu'en temps normal les atterrissages sont assez brusques (ce qui fait d'ailleurs applaudir les asiatiques friands du Musée des Offices).

Nous avons donc attendu 3 heures pour embarquer, puis une heure de plus pour attendre les personnes déroutées sur d'autres lignes (et par la situation par la même occasion). Une jeune femme embarque en sanglotant. Visiblement, elle ne voulait en être au grand désespoir de son ami qui la consolait avec de grande envolée lyrique (en italien dans le texte). Les portes se ferment. Un steward explique à mon voisin que nous serons les seuls à pouvoir décoller "grâce aux performances exceptionnelles de cet Airbus 318". J'ai commencé alors à me dire que ce ne serait pas de tout repos… En effet, même si Airbus fait de bons avions, la concurrence n'en est plus au biplan en bois et tissu. En conséquence, la marge de sécurité ne pouvait qu'être faible. Nous voilà donc en bout de piste. L'avion, à l'arrêt, bougeait sous les assauts du vent. La pleureuse italienne, qui avait eu la bonne idée de se mettre juste derrière moi, redouble de sanglots et d'invocations à sa mère, sa grand-mère et toutes les autres saintes de la Création. C'est parti, le décollage se passe bien. Par contre, les turbulences créées par le vent dans les montagnes nous secouent, disons, très violemment. Les accélérations se font sur les six degrés de liberté avec une intensité surprenante. Trous d'air, claques latérales me font décoller de mon siège à plusieurs reprises. La pleureuse italienne disjoncte alors complètement, dit qu'elle veut descendre (sic..), détache sa ceinture de sécurité mais son copain la plaque avant qu'elle n'aille plus loin. Un grand gaillard devant moi se met à pleurer. Les gens s'accrochent à ce qu'ils peuvent. En général à leurs chaussettes. Certains bagages tombent des coffres accentuant la panique à bord. Entre la fatigue de deux jours de réunion avec mes pizzaiolos, le cocasse de la pleureuse et la nuit blanche, je pars alors dans un fou-rire aux larmes au lieu de me paniquer. Au bout de cinq minutes qui parurent un peu longues, la situation revient à la normale. Les gens se mettent à vomir dans les petits sacs prévus à cet effet. J'ai maintenant la preuve qu'ils sont trop petits. Mais les hôtesses restent calmes et réconfortent les gens. Elles auront été remarquables de self-control. L'une d'elles, qui devait avoir mon âge et n'en était donc pas à sa première heure de vol, m'a avoué qu'elle n'avait jamais vécu un tel décollage. C'est là que je me suis dit que j'aurais peut-être dû m'inquiéter au lieu de rire bêtement...  

Après quelques dizaines de minutes, nous approchons des Alpes. Le pilote nous dit alors que ça va encore secouer et fait un léger piqué pour passer sous la zone perturbée. La pleureuse, qui s'était calmée, se remet à paniquer. Elle a dit à son copain quelque chose comme  "Maman, Maman, on va s'écraser dans les Montagnes. Je vais avoir froid, ma doudoune est en soute. Comme mes lunettes de soleil d'ailleurs. Comment survivre? Y-a-t-il un bar en vue, d'ailleurs?". Les turbulences étaient beaucoup moins violentes, disons dans la norme habituelle des vols hivernaux.

Paris arrive en vue. Le pilote nous dit avant l'atterrissage qu'il est désolé pour les conditions de vol et que si des personnes le souhaitent, elles pourront s'entretenir avec du personnel spécialisé dans ce genre de traumas. Bigre, on a du frôler la catastrophe.

Une hôtesse passe me voir pour me demander si je n'ai pas eu trop peur. Je lui réponds que non, et que je me suis bien marré. Je pense que j'ai dû friser l'internement d'office.

aeroport de florence

 

Piste courte, montagne et vent. Bienvenue à Luna Park!

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